Le Mozambique a vécu une journée cruciale ce mercredi avec l’investiture de Daniel Chapo comme président, dans un contexte politique et social marqué par des tensions sans précédent. Dans une capitale Maputo quadrillée par des forces de sécurité, le climat était à la fois celui de l’incertitude et de l’espoir de sortir de l’impasse post-électorale.
Une investiture sous haute surveillance
Daniel Chapo, 48 ans, ancien gouverneur provincial au parcours jusque-là discret, a officiellement pris les rênes du pays. Cette investiture s’est déroulée sur la place de l’Indépendance, entièrement bouclée par les forces de l’ordre. Cyril Ramaphosa, président de l’Afrique du Sud voisine, a été le seul chef d’État étranger présent, signalant un soutien timoré de la communauté internationale.
Le climat tendu autour de cette prestation de serment a été exacerbé par l’appel renouvelé de Venancio Mondlane, chef de l’opposition, à « paralyser » le pays par des manifestations quotidiennes. Ce dernier, qui conteste les résultats d’une élection marquée par des irrégularités, reste une figure centrale du mécontentement populaire.
Des tensions post-électorales meurtrières
Depuis l’annonce des résultats électoraux en octobre, confirmés en décembre par la plus haute cour du Mozambique, le pays est en proie à des violences post-électorales qui ont fait près de 300 morts. Ce climat délétère est alimenté par des grèves, des blocages et des affrontements entre manifestants et forces de l’ordre.
Lors de son discours d’investiture, Daniel Chapo a promis de « rassembler les Mozambicains et d’engager un dialogue inclusif ». Cependant, aucune rencontre officielle avec Venancio Mondlane, surnommé « VM », n’a été confirmée. Ce dernier, récemment revenu d’un exil volontaire, accuse le pouvoir d’une répression brutale contre ses partisans.
Le Frelimo face à ses divisions internes
Le parti au pouvoir, le Frelimo, est lui-même miné par des dissensions internes. L’analyste politique Johann Smith estime que ces fractures affaiblissent la capacité du parti à répondre efficacement à la crise. Daniel Chapo, choisi par défaut dans un contexte de divisions, doit maintenant relever le défi de fédérer non seulement le parti, mais aussi une nation en crise.
Un isolement diplomatique inquiétant
L’absence de nombreux dirigeants étrangers à l’investiture envoie un signal clair sur le scepticisme international à l’égard du scrutin. Même des alliés régionaux, tels que le président rwandais Paul Kagame, se sont contentés d’envoyer des représentants de rang inférieur.
Pour Éric Morier-Genoud, historien spécialiste du Mozambique, cette situation pourrait contraindre Daniel Chapo à annoncer rapidement des réformes, voire à intégrer des figures de l’opposition et de la société civile dans son gouvernement.
Une sortie de crise incertaine
Alors que Venancio Mondlane promet de poursuivre les manifestations jusqu’à satisfaction des revendications, les regards restent tournés vers Daniel Chapo. Ce dernier devra rapidement prouver sa capacité à apaiser les tensions, notamment en instaurant un dialogue sincère avec l’opposition et en posant les bases de réformes structurelles.
Le Mozambique est à la croisée des chemins. Entre un pouvoir contesté et une opposition résolue, le pays lusophone doit impérativement retrouver la stabilité pour amorcer une sortie de crise. La tâche qui attend Daniel Chapo s’annonce titanesque.